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L'Europe vers 1789 :
En 1789, cinq grandes puissances
occupaient en Europe le premier rang: La
France,
l'Angleterre,l'Autriche, la Russie et la Prusse.
En dehors des petites principautés groupées autour de
l'Autriche et formant avec elle l'empire d'Allemagne, les Etats
secondaires de l'Europe étaient l'Espagne, le
Portugal, l'Italie,la Suisse, la Hollande, le Danemark,la Suède, la
Pologne et la Turquie.
Depuis les traités d'Utrech qui servirent de base au droit
politique pendant le XVIIIème siècle, les changements les plus importants
opérés dans la situation de l'Europe eurent lieu :
1°) en
Angleterre, car ce pays perdit les
Etats-Unis, mais accrut d'une façon importante son empire
colonial par la conquête du Canada
et de l'Hindoustan.
2°) en Italie,
où les Bourbons devinrent maîtres des
couronnes de Parme et de Naples.
3°) en
Allemagne, où la Prusse
conquit une place prépondérante.
4°) en Russie,
car l'empire russe étendit ses limites aux dépens de la
Suède et de la
Turquie.
Par suite des guerres
et des alliances de la fin du dix-huitième siècle,
la France vers 1789, avait pour alliées
l'Espagne et
une partie de l'Italie;
l'Angleterre tenait le
Portugal et la Hollande sous sa
dépendance; l'Autriche dominait dans
le nord de
l'Italie et dans les
Etats catholiques du sud de l'Allemagne;
autour de la Prusse se rangeaient les
Etats allemands du nord et de l'ouest.
La Russie, dont l'empire s'étendait de la Baltique à la mer Noire,
menaçait la Turquie et songeait à s'emparer du reste de la Pologne qui
n'avait encore subi qu'un seul partage.
Les Grandes Puissances
FRANCE
:
La France, récemment augmentée de la Lorraine
et de la Corse, comprenait
trente-trois provinces.
Elle avait pour limite au nord et à l'ouest le Pas-de-Calais,
la Manche et l'Océan; au sud les Pyrénées et la Méditerranée; à l'est, le
conté de Nice, le Piémont, la Savoie, la Suisse, le Rhin depuis
Lauterbourg jusqu'à Huningue, puis une ligne formée des places fortes de
Landau, Sarrelouis, Bouillon, Marienbourg, Philippeville, et aboutissant
au-dessus de Dunkerque.
Quelques territoires enclavés dans la France ne faisaient cependant
point partie du royaume; c'étaient : le Comtat-Venaissain et Avignon,
qui appartenaient au pape, le comté de Monbéliard,
au duc de Wurtemberg, et la ville libre de Mulhouse.
La population de la France était d'environ vingt-six millions
d'habitants.
L'empire colonial de
la France, relevé quelque peu au traité de Versailles, était loin
d'atteindre l'importance qu'il avait avant la guerre de Sept ans.
Toutefois il comprenait :
En Asie, cinq villes dans
l'Inde
:
Chandernagor, Pondichéry, Karikal, Mahé et Yanaon.
En Afrique, les
comptoirs de Bône et de la Calle pour la pêche du
corail sur la Méditerranée; les deux îlots de Saint-Louis et Gorée
sur la côte de Sénégambie; l'île Bourbon, l'île de
France et les Séchelles dans l'Océan indien.
En Amérique, une partie
de la Guyanne et dans les Antilles, une partie de Haïti,
c'est à dire notre colonie de Saint-Domingue, la Martinique, la
Guadeloupe, Marie-Galante, les Saintes, la Désirade, Sainte-Lucie, Tabago,
la plus grande partie de Saint-Martin.
Au banc de Terre-Neuve
les îlots de Saint-Pierre et de Miquelon.

GRANDE - BRETAGNE
L'Angleterre, avait pour roi
Georges III, dont les Etats
comprenaient en Europe les trois royaumes d'Angleterre,
d'Ecosse et d'Irlande, les îles des côtes de
Normandie, Gibraltar en Espagne, et
l'électorat de Hanovre en Allemagne.
Les possession coloniales de l'Angleterre étaient
immenses :
En Asie, elle occupait
les Indes en grande partie et étendait son influence sur les
territoires indiens qui ne lui étaient pas directement soumis.
Seul le pays Mysore, appartenant à Tipoo-Sahib, conservait
son indépendance, c'est toutefois au XIXème siècle surtout, par la
réduction des Mahrattes, des Rasjpoutes, des Birmans, que la domination
anglaise allait s'asseoir véritablement sur l'Inde.
En Afrique, les Anglais
avaient établi des comptoirs, ou établissements commerciaux, dans la
Gambie et sur les côtes de Guinée; ils
possédaient les îles de Saint-Hélène et de l'Ascension.
En Amérique, ils avaient perdu
les territoires devenus Etats-Unis, mais ils possédaient la
Nouvelle Bretagne, le Canda, l'Acadie, les îles de Terre-Neuve, les
Bermudes, les Lucayes, la Jamaïque et plusieurs des petites Antilles.
En Australie, ils avaient
récemment fondé Sydney, sur l'Océan Pacifique.

AUTRICHE
L'Autriche était la puissance la
plus considérable de l'empire d'Allemagne.
Déjà au XVIIème siècle, elle comprenait l'archiduché
d'Autriche, la Bohème, la Hongrie et le Tyrol.
Dans le cours du XVIIIème siècle, le traité d'Utrecht lui avait
donné la Belgique et le Milanais enlevés à
l'Espagne; elle s'était emparée de la Croatie, de l'Esclavonie
et de la Transylvanie sur les Turcs; elle avait enfin, au
démembrement de la Pologne, obtenu la Galicie.
Par contre, elle avait perdu le royaume des
deux-Siciles (1730), les duchés de Parme et de
Plaisance (1748), et enfin la Silésie, cédée à la
Prusse par le traité d'Aix-la-Chapelle.
En 1789,
l'empereur Joseph II régnait sur
l'Autriche. Il eut en 1790 pour successeur son frère
Léopold II.
La couronne impériale n'était point sortie de la maison
d'Autriche depuis 1438, mais l'autorité de l'empereur sur les Etats
allemands, déjà fort réduite par le traité de Wesphalie, était encore
diminuée depuis le développement de la Prusse, que l'Autriche avait essayé
en vain d'arrêter.
L'Allemagne
est toujours partagée en deux cercles :
Les principaux Etats en dehors de l'Autriche et de la Prusse sont
l'électorat de Bavière, où règne le duc
Maximilien-Joseph; celui de
Saxe, qui a pour duc
Frédéric-Auguste III, et celui de Hanovre
réuni à la couronne d'Angleterre.

PRUSSE
La Prusse faisait contre poids en
Allemagne à la puissance de l'Autriche.
En 1701, quand l'électeur de Brandebourg,
Frédéric de Hohenzollern, obtint de l'empereur
Léopold II l'autorisation de
prendre le titre de roi de Prusse, son royaume ne comprenait que le
duché de Prusse, le Brandebourg et
quelques évêchés sécularisés.
Frédéric-Guillaume Ier
avait acquis les principautés de Neuchâtel, en
Suisse, de Vallengin, une partie du duché de Gueldre, dans
les Pays-Bas, et le pays de Kessel, les îles d'Usedom
et de Wollin, les villes de Stettin, en Poméranie, et de
Gollnow.
Son fils, le
Grand Frédéric, avait conquis la Silésie et la
Prusse polonaise. Il avait placé la Prusse au rang des grandes
puissances.
Frédéric-Guillame II, neveu du
Grand Frédéric, lui avait succédé en 1786. Il était loin
d'égaler son oncle en génie; mais il se trouvait à la tête d'une nation
fortement organisée et d'une armée puissante par sa discipline, le nombre
de ses soldats et le souvenir glorieux de ses succès

RUSSIE
En 1789, la Russie était gouvernée
par l'impératrice Catherine II.
La Russie, avant elle, grâce aux conquêtes de
Pierre le Grand, touchait déjà la mer
Caspienne.
Catherine II avait
ajouté à cet immense empire les provinces qui lui étaient échues
dans le premier partage de la Pologne; elles s'était rendue
maîtresse de la mer Noire par l'annexion
de la Crimée et la fondation du port de Sébastopol.
Le rapide agrandissement de la Russie avait été facilité par la
décadence de la Suède, de la Pologne et de la Turquie.
Catherine II avait
abandonné le Système du Nord, c'est à dire la politique d'alliance
avec la Prusse, le Danemark et l'Angleterre, contre l'influence de
l'Autriche et de la France.
Elle s'était rapprochée de Louis
XVI et négociait avec lui un projet de quadruple alliance
entre la Russie, l'Autriche, la France et l'Espagne, destinée à tenir en
échec les prétentions maritimes de l'Angleterre et les ambitions de la
Prusse.

Les puissances
secondaires
ESPAGNE
Charles IV était monté sur le trône d'Espagne vers la fin
de l'année 1788.
Cette puissance s'était vu enlever par la France le
Roussillon, la Franche-Comté et une notable partie des
Pays-Bas, la Sardaigne et le Milanais.
Les Anglais lui avaient pris Gibraltar et la
Jamaïque.
Le Portugal s'en été détaché; elle était
donc fort déchue de son ancienne grandeur.
Son empire colonial était très étendu :
En Afrique : elle possédait :
Ceuta, Oran, les Canaries, Fernando-Po et Annobon.
En Océanie : les Phillippines et
les Mariannes.
En Amérique de sud :
Buenos-Ayres, le Chili, le Pérou, la Nouvelle-Grenade,
Caracas, c'est à dire l'Amérique de sud tout entière, moins le
Brésil et les Guyanes.
Aux Antilles : Cuba, Porto-Rico
et la partie orientale de Saint-Domingue.
En Amérique du Nord : le
Mexique, la Louisiane, le Guatemala, la Floride et la Californie.
L'or tiré d'Amérique avait fait négliger en Espagne le
commerce, l'industrie et l'agriculture. L'administration des colonies
aussi vastes amenait chaque année une émigration qui appauvrissait la
métropole.

PORTUGAL
Le
Portugal, gouverné par la reine Maria
de la maison de Bragance, était
renfermé dans ses limites actuelles.
Il subissait complètement l'influence politique et
commerciale de l'Angleterre.
Ses colonies étaient :
En Amérique du Sud : le Brésil.
Dans l'Océan Atlantique : les îles des
Açores et Madère.
En Afrique : le Congo, le Mozambique,
les îles du Cap-vert, de Saint-Thomas et du Prince.
Dans l'Hindoustan : Goa et Macao.

HOLLANDE
La
république des Provinces-Unies ne comprenait en Europe que les possessions
actuelles du royaume des Pays-Bas.
Ses possessions coloniales étaient considérables :
En Amérique : la Guyane,
et dans les Antilles, Curaçao.
En Afrique : des comptoirs de la
Côte d'Or et au Cap de Bonne-Espérance.
En Asie : Cochin, sur la
côte de Malabar; sur celle de Coromandel, ils venaient il est vrais de
perdre Négapatam en 1781, ils possédaient encore
Ceylan, Malacca, et enfin les îles de la Sonde; Sumatra,
Java, Bornéo et les Moluques. Elle avait un comptoir au
Japon.
Son commerce
était donc immense; mais son influence politique était devenue à peu près
nulle.
Elle s'était, par crainte de
Louis XIV, mise à la remorque
de l'Angleterre.
Après avoir, en 1747, rétabli le stathoudérat, et
l'avoir déclaré héréditaire dans la maison d'Orange, les Provinces-Unies
essayèrent de l'abolir pendant la guerre d'Amérique. Mais l'Angleterre et
la Prusse intervinrent en faveur du stathouder
Guillaume V, et réprimèrent la
ligue des patriotes hollandais favorables à la France (1788).

ITALIE
L'Italie
était soumise à une double influence:
Au nord à celle de l'Autriche, qui
possédait Milan et
la Toscane;
Au midi à celle des Bourbons
d'Espagne, qui régnaient à Naples
et à Parme.
Elle était
divisée en plusieurs petits Etats indépendants
dont les principaux étaient:
1°) Les Etats
Pontificaux, qui comprenaient le territoire de
Rome,
les Marches, la
Romagne,
l'Ombrie, ainsi que
Bénévent, dans le royaume de Naples, et
Avignon en
France. Pie VI était alors souverain
pontife.
2°) Le
royaume des Deux Siciles gouverné par un Bourbon d'Espagne,
Ferdinan
1er. Il se composait du royaume de
Naples et de la Sicile;
3°) Le
royaume de Sardaigne, datant de 1720, et créé pour le duc de
Savoie, Victor
Amédée 1er;
il embrassait l'île de Sardaigne et la Savoie,
avec le Piemont, c'est à dire tout le territoire compris
entre le lac de Genève, le Rhône, le Tessin et le lac Majeur.
Il était gouverné par Victor-Amédée III
qui avait succédé, en 1773, à son père
Charles-Emmanuel.
Les autres petits Etats indépendants
étaient le duché de Parme,
celui de Modène,
la principauté de Monaco et
les républiques de Venise, de Lucques, de
Gênes et de Saint-Marin.

SUISSE
La Suisse, reconnue comme Etat indépendant au traité de Wesphalie, formait
en 1789, une république fédérative, composée de treize cantons.
Ces treize cantons
étaient ceux d'Uri, de Schwytz, d'Unterwalden,
de Lcerne, de Zurich, de Glaris, de Zug, de Berne, de Fribourg, de
Soleure, de Bâle, de Schaffhouse et d'Appenzel.
Ils n'étaient rattachés entre eux par aucun traité général,
mais seulement par une foule de petites conventions de canton à canton.
Protégés par leurs montagnes et par un excellent système de
défense de leurs frontières, ils avaient conservé une stricte neutralité,
pendant les guerres qui avaient agité l'Europe durant le XVIIIème siècle.

SUEDE
A la mort de Charles XII,
la Suède avait disparu pour toujours du rang des grandes puissances.
Sous les successeurs de Charles XII, les guerres civiles avaient réduit à
rien l'autorité royale. Gustave III,
monté sur le trône en 1771, avait mis fin à l'anarchie et, en 1789, il
venait de convoquer les Etats Généraux et de donner à la Suède une
nouvelle constitution, qui rendait le pouvoir à la royauté.
La Suède possédait encore toute
la presqu'île scandinave, moins
la Norvège et la Laponie qui appartenaient aux Danois,
la Finlande jusqu'au Kymen,
les îles d'Aland, de Gothland, d'OEland et de
Rugen; Stralsund en Poméranie et la Pomérannie citérieure, Wismar et
quelques villes du Mecklembourg.
Elle possédait aussi dans les Antilles la petite
île de Saint-Barthélémy qui lui avait été vendue par la
France.

DANEMARK
Outre
l'archipel Danois et les pays de terre ferme, le Danemark possédait le
Sleswig, le Jutland, une partie du Holstein,
la Norvège, la Laponie septentrionale, les îles Féroë, l'Islande et le
Groëland.
Ses colonies
étaient:
Dand l'Inde,
le comptoir de Tranquebar,
En Afrique,
le comptoir de Christianborg sur la côte d'Or,
Aux Antilles,
les îles de Saint-Jean, de Sainte-Croix et de Saint-Thomas.
Le roi de Danemark,
Christian VII, avait été frappé
d'aliénation mentale en 1784. Son fils, le prince royal, qui lui
succéda en 1808, sous le nom de Frédéric VI,
avait pris la régence du royaume. Habilement secondé par le célèbre
ministre André Bernstorff,
le prince royal accomplissait en Danemark de grandes réformes.

POLOGNE
Le premier partage de la Pologne (1772) avait enlevé
à ce royaume le quart de son territoire, et l'avait placé sous
l'indépendance de la Russie.
Les Polonais, en 1782, encouragés par la Prusse, songeait à
revendiquer leur indépendance nationale et à se donner une nouvelle
constitution, pour rendre le trône héréditaire, après la mort du roi
Stanislas-Auguste Poniatowski.
Mais ce réveil de l'esprit national allait être étouffé par
la Russie, et devait amener bientôt (1793) un second démembrement, puis un
dernier (1795) de la malheureuse nation.

TURQUIE
La Turquie formait encore un
empire très étendu, puisque, avec la Turquie
d'Europe et l'Asie-Mineure,
elle possédait la péninsule grecque toute
entière, la Moldavie, la
Bessarabie et les côtes de la mer Noire; mais elle était en
pleine décadence.
Son
organisation militaire était toujours celle qu'elle avait quatre siècles
auparavant; son administration était fort défectueuse, les sultans étaient
incapables et livrés à l'indolence.
En 1789, le sultan
Sélim III soutenait contre la
Russie et contre l'Autriche une guerre entreprise par son prédécesseur
Abdul-Hamid.
Sans l'intervention de l'Angleterre et de la Prusse, cette guerre allait
aboutir au démembrement de la Turquie.
Dès lors, commençait
la question d'Orient, qui
devait avoir une grande importance au dix-neuvième siècle.

J.L. CHARLOT |