La Paroisse de Lège vu par l’abbé Jacques BAUREIN dans les « Variétés Bordeloises » Volume III, entre 1784 et 1786.

ARTICLE  XXXVI
 

 

Le texte est intégralement repris comme sur livre de l'abbé Jacques BAUREIN

 

SAINT-PIERRE  DE  LEGE

Cette Paroisse de l'Archiprêté de Buch et Born est placée au nord du Bassin d'Arcachon : son Eglise n'est pas ancienne, et elle n'a d'ailleurs rien de remarquable. Darnal, qui finit sa Chronique en l'année 1619, nous apprend (p. 13, édition de 1620), que les sables de la mer avoient fait des progrès considérables sur nos côtes, que les habitans de Lege avoient été obligé de transporter leur Eglise à la distance de près d'une lieue de l'ancienne; il ajoute que dans le temps qu'il écrivoit, il y avoit 60 ans que ce transport avoit été fait, et que néanmoins ils étoient dans le cas de la reconstruire une seconde fois dans un lieu plus avancé dans les terres. Si le millésime 1666, qui est gravé au-dessous du clocher de Lege, concerne la construction de l'Eglise, il n'y a point de doute qu'elle n'ait été reconstruite depuis l'époque où écrivoit Darnal; mais, à dire vrai, on n'auroit pas placé sur le clocher un millésime qui auroit concerné l'édifice entier de cette Eglise.
Quelques raisons néanmoins peuvent induire à penser que c'est la seconde fois que cette Eglise a été rebâtie.....
1° Celle dont parle Darnal, et qui avoit été abandonnée, étoit à la distance d'environ une lieue de la nouvelle; au lieu que suivant les mémoires qu'on a reçus sur cette Paroisse, le lieu de Testas, où étoit placée l'ancienne Eglise, n'est qu'à distance d'un quart de lieu de l'Eglise actuelle. Cette différence de distance feroit présumer qu'il pourroit être question de deux différentes Eglises.
2° C'est qu'au temps de Darnal la nouvelle Eglise de Lege étoit à même d'être couverte par les sables; il s'est écoulé depuis cette époque plus d'un siècle et demi : les sables néanmoins ont fait et font tous les jours trop de progrès, pour que l'Eglise dont parle ce Chroniqueur, eût pu se garantir de leur approche. Il y a donc lieu de penser qu'elle en a été couverte, et que c'est celle qui étoit placée au lieu de Testas. Quoi qu'il en soit, il est à craindre que les habitants de Lege ne se trouvent encore dans le même cas; l'Eglise actuelle n'est distante des sables que d'une portée de mousquet chargé à balle.
La Cure de Lege est séculière et à la collation de M. l'Archevêque; le Seigneur du lieu est gros Décimateur : il existe néanmoins un procès entre ce Seigneur et le Curé, dans la discution duquel il ne nous appartient pas d'entrer. Il y a quatre hameaux ou quartiers dans la Paroisse de Lege; savoir, Le Bourg, la Carreyre, les grands Housteaux et le Bourg d'Ignac : celui-ci ne dépend pas néanmoins de la Seigneurie de Lege. Plusieurs quartiers de cette Paroisse ont été couverts par les sables depuis environ une vingtaine d'années; mais depuis le temps que ces mêmes sables font des progrès continuels sur nos côtes, et en particulier sur cette Paroisse, combien d'autres quartiers ne doivent pas avoir disparu ?
Lege étoit anciennement un lieu considérable, et à le voir tel qu'il est à présent, on ne s'imagigneroit point que les Ducs de Guienne n'y eussent eu un manoir particulier; ce fait est néanmoins incontestable, et le don qu'ils firent à l'Eglise Cathédrale de Saint-André, ne nous permet pas d'en douter.
M. Lopes rapporte la Chartre de cette donation à la page 365 de l'Histoire de cette Eglise. Celle-ci s'étoit extrêmement ressentie des ravages que les Normands ne cesserent de faire dans cette Province pendant le cours du neuvième siècle; elle s'en ressentoit encore vers la fin du onzième, puisqu'aux termes de cette Chartre, elle étoit presque dépourvue d'Ecclésiastiques pour en faire le service, et que d'ailleurs ses édifices étoient presque entièrement ruinés. Ce furent ces considérations qui déterminerent la donation de la Seigneurie de Lege à cette Eglise. On comprend sans peine que c'eût été pour elle une foible ressource, si le lieu de Lege eût été dans la situation où il a été réduit depuis cette époque. Il falloit donc que ce lieu fût anciennement considérable, et que le produit des droits seigneuriaux fût suffisant pour contribuer au rétablissement de l'Eglise Cathédrale de Bordeaux, réduite pour lors à un état des plus tristes.
Les choses ont bien changé depuis cette époque : la Paroisse de Lege est autant infectée par les sables de la mer, que Bordeaux et l'Eglise de Saint André ont pu l'être autrefois par les ravages des Normands : on auroit de la peine à le croire, si les Mémoires qu'on a reçus ne l'assuroient; savoir, qu'il n'y a pas un seul arbre dans l'étendue de la Seigneurie de Lege; ce n'est que dans le quartier d'Ignac, situé au bord du Bassin, où il y ait des arbres et des bois; mais ce quartier, quoique faisant partie de la Paroisse, dépend néanmoins d'une Seigneurie différente, ainsi qu'on l'a déjà observé.
Il y a environ vingt-cinq ans qu'il s'est formé dans Lege une espèce de riviere. Voici comment la chose est arrivée : les eaux des étangs placés au nord de cette Paroisse, et au pied des dunes, s'étoient pratiquées une espèce de canal souterrein, par lequel elles se déchargeoient dans le Bassin d'Arcachon. Le tuf qui regne à peu de profondeur dans l'étendue de la Paroisse de Lege, s'étant affaissé dans cette partie, ce canal, qui a quanrante pieds de largeur, parut à découvert; il s'est insensiblement allongé; ensorte qu'il s'étend maintenant en longueur l'espace d'une lieue. Les eaux qui se déchargent par ce canal, viennent des étangs du Porge, de Lacanau et de Hourtin, qui communiquent entr'eux. I y a lieu de penser qu'avant long-temps il se formera une rivière qui porroit devenir navigable; on a déjà vu dans de grands débordemens des gens de Hourtin aller chercher, avec des pinasses, des huîtres au Bassin d'Arcachon, et les porter dans le Bas-Médoc. Si ce canal contunue à s'allonger vers le nord, il joindra tôt ou tard aux étangs, et dès-lors il deviendroit navigable en tout temps; il n'y a point de doute que ce ne fût, à tous égards, un avantage considérable, soit pour les Paroisses qui sont bordées par ces étangs, soit pour celles qui les avoisinent.
Il est fait mention dans divers anciens titres d'un estey de Campanhes sur lequel on avoit construit des moulins; il y avoit même dans la Paroisse de Lege un Village qui portoit ce nom : il y a apparance que l'un et l'autre ont été couverts par les sables; ou moins n'en est-il fait aucune mention dans les Mémoires qu'on a reçus sur cette Paroisse.
L e terrein de celle-ci est égal et uni; ce ne sont que des sables au-dessous desquels, et à peu de profondeur, on trouve une espèce de tuf appellé alios dans le pays. Il y a très peu de landes à défricher, soit dans Lege, soit dans le quartier d'Ignac. Les productions de cette Paroisse sont le seigle et le bled d'Espagne ou maïs, que les gens du pays appellent Milloc.
La Paroisse de Lège est bornée, vers le midi, par celle d'Andernos; au nord, par celle du Porge; au couchant, par la mer océane, et vers le levant, par une étendue considérable de landes incultes et inhabitées. Lege est placé à la distance de neuf grandes lieues de Bordeaux, et à son couchant, il est distant de sept lieues de La Teste par terre, et de trois seulement par eau, de deux lieues du Porge, d'une lieue d'Andernos, d'autant de la mer, et d'une demi-lieue du Bassin d'Arcachon. Cette Paroisse n'a qu'une lieye de circuit, en ne comprenant dans cette enceinte que les fonds en culture; car s'il étoit question de ceux couverts par les sables, son circuit seroit environ de cinq à six lieues; mais ensevelis, comme ils sont, à la profondeur de quarante pieds pour le moins sous les dunes, on les regarde, comme entièrement perdus, excepté qu'on trouvât le moyen de fixer ces sables et d'y faire croître des forêts de pins. Le quartier le plus éloigné de l'Eglise n'est qu'à la distance d'un quart de lieue. On peut faire parvenir les lettres que par la voie des gens de l'endroit qui viennent à Bordeaux, pour y porter des huîtres ou du poisson : les huîtres qui en viennent sont estimées. La route de ces gens pour venir à Bordeaux, est de passer par la Paroisse de Martignas, où il existe un chemin qui porte le nom de la Paroisse de Lege. La pêche, le transport du poisson et la culture des terres, font l'occupation des gens de Lege.
Il y a soixante-cinq feux ou familles dans cette Paroisse, savoir : trente-cinq dans la Seignerie de Lege, et trente dans celle d'Ignac. C'est la tradition de pere en fils dans cette Paroisse, qu'on voyoit autrefois aux environ du Bassin des restes de fours et de débris d'anciennes bâtisses; il y avoit sans doute des Villages; mais les vents de sud-ouest, qui sont si violents surnos côtes, sont cause que les eaux du Bassin ont couvert beaucoup de terrein, que les sables se sont accumulés dans cette partie, où ils s'étendent d'environ trois quarts de lieue.
Il résulte d'un titre du 22 Mars 1263, qu'il y avoit un château dans la Paroisse de Lege, qui appartenoit au Chapitre de Saint-André, puisque celui-ci, en donnant à fief nouveau deux moulins placés sur l'estey de Campanhes, se réserva, par exprès, que la censive de deux esquartes de froment et de trois de millet, seroit portable à Lege devant la Barbacane du Château. On sait par tradition l'ancienne existance d'un Château dans Lege; on ignore si c'étoit le même que celui dont on vient de parler; au moins existe-t-il un local du côté de la mer, appellé au Castera, dénomination qui annonce les ruines d'un ancien château : on prétend qu'il y avoit une allée d'ormeaux qui conduisoit de ce château jusqu'au bord de la mer.
On ne peut douter que les habitans de Lege n'aient été anciennement serfs questaux, ainsi que l'étoient la plupart des habitans du Médoc et du Pays Bordelois. Ce fait est établi d'ailleurs par plusieurs titres, et entr'autres par un de l'année 1373 : c'est cet ancien état des questalité, si on en croit Cleirac, dans ses Us et Coutumes de la mer (p. 122 et suivantes), qui donna occasion aux Seigneurs, dont les Seigneries s'étendoient sur les côtes de l'Océan, de s'emparer, au préjudice de nos Rois, des droits de côtes, de bris et de naufrage.
On n'a garde de désapprouver les raisons qu'allegue cet Auteur en faveur du droit public actuel de la France, qui est fondé sur des principes aussi sages que solides, et qui a mis fin à une infinité de barbaries et d'inhumanités qui se commettoient à l'occasion de l'exercice de ce droit; mais comme cet Auteur a inséré dans son Ouvrage un ancien Mémoire qu'il a extrait, dit-il, du livre verd de la Connétablie de Bordeaux, côté C au feuillet 221, et qui a rapport au lieu de Lege dont il est ici question, on se bornera à en rapporter la substance et faire quelques observations à ce sujet.
1° Suivant ce Mémoire, certains Seigneurs qui y sont nommés, avoient anciennement des hommes questaux dans les Paroisses de Lege et Saint-Vincent de Buch, à raison desquels ils relevoient du Roi, et étoient immédiatement Justiciables des Juges qui rendoient la justice au château de Lombriere.
2° Que dans le temps que Raymond du Mirail étoit Gouverneur de ce Château, la mer jetta sur les c^tes de ces deux Paroisses, deux baleines et des effets naufragés.
3° Que lorsque le Seigneur Hawering étoit Sénéchal de Guienne, une baleine morte y fut aussi jettée, ainsi que les harpons dont s'étoit servi pour la percer; que ces harpons furent suspendus à une des poutres de la grande salle de ce Château, en signe de la possession où étoit le Roi, de ces côtes.
4° Que néanmoins les Chanoines de Saint-André, dès le mois de Janvier 1304, s'étoient mis en possession de la côte de Lege, au grand préjudice du Roi, qui avoit éprouvé un dommage de plus de 20000 livres tournoises, à raison des pièces d'ambre qui avoient été jettées sur cette côte.
Je ne sais si tous ces faits consignés dans ce Mémoire qui paroît extrêmement fautif, tel qu'il est rapporté par Cleirac, sont bien exavts; ce qui est certain, c'est que le droit de côte appartenoit inconstestablement aux anciens Ducs de Guienne, et que ceux-ci en firent don et s'en dépouillerent en faveur de ce Chapitre : Curtem legiam cum omnibus ad se pertinetibus, est-il porté par exprès dans le titre de donnation déjà cité.
J'observerai d'ailleurs que ce droit de côte n'étoit pas anciennement aussi inhérent à la Couronne, qu'il l'est maintenant. Il y avoit des Seigneries qui en étoient autrefois en possession légitime, et c'est ce qui résulte clairement de la Chartre d'Henri, Roi d'Angletrerre, que Cleirac lui-même rapporte (p. 97), et qui n'est pas d'Henri III, comme il le prétend, mais d'Henri II. On la trouve transcrite d'une manière bien plus correcte dans le Recueil de Rymer (t. I, part. 1, p. 12).
Lorsque, sous le Roi Charles IX, les Ecclésiastiques furent obligés, pour subvenir aux besoins de l'Etat, d'aliéner une portion de leur temporel, le Chapitre de Saint-André vendit, entr'autres choses, la Seigneurie de Lege, qui jouissoit du titre de Baronnie; elle fut acquise par M. Augier de Gourgue; elle passa dans la suite au pouvoir de M. le Duc d'Epernon. M. de Marboutin, Conseiller au Parlement de Guienne, est actuellement proriétaire de cette Baronnie. Il paroît par un titre du 22 Octobre 1362, que Guilhem, ou Guillaume de la Casa, qualifié Daudet, c'est à dire, Damoiseau, étoit habitant de la Paroisse de Lege en Buch.
En 1241, les lieux apppellés le Boms et le Frontau firent le sujet d'une contestation considérable entre le Cahapitre de Saint-André et Amanieu, Captal de Buch. Ces lieux furent adjugés à ce Chapitre par Sentence arbitrale du mois d'Avril 1242; ils étoent dès-lors inondés par les eaux du Bassin, et depuis cette époque ils n'ont point été découverts, la mer n'ayant fait qu'empiéter sur la Paroisse de Lege; elle s'étendoit anciennement jusqu'au canal, appellé à cette époque canal du Bernet, qui faisoit anciennement séparation de cette Seignerie d'avec le Captalat de la Teste. Ce canal devoit même rester en commun entre les deux Seigneurs. On peut juger par là combien la mer a fait de progrès sur nos côtes.
Henri III, Roi d'Angleterre, par ses Letrres-Patentes datées du 3 Novembre, la vingt-sième année de son regne, permit aux Doyen, Chanoines et Chapitre de Bordeaux, de tenir marché public à Lege, tous les Mardis de chaque semaine.

ARTICLE XXXV.

QUARTIER D'IGNAC.

Il est placé dans la contrée de Buch et sur le bord septentrional du Bassin d'Arcachon. Quoiqu'il ait un rôle de taille distinc et séparé, il ne forme pourtant pas une Paroisse; il est au contraire dépendant de celle de Saint-Pierre de Lege; il est néanmoins placé dans uns Seugneurie et une Juridiction différentes; c'est ce qui donneroit lieu à penser qu'Ignac pouvoit n'avoir pas toujours fait parie de la Paroisse de Lege, et que ce n'est qu'après coup qu'il peut y avoir été uni.
L'Auteur du Dictionnaire universel de la France lui attribue 204 habitans. m. l'Abbé Expilly, dans son Dictionnaire géographique, y compte 45 feux, qui, à cinq personnes par feu, suivant le calcul de cet Ecrivain formeroit le nombre de 225 personnes; il y ajoute que cette Paroisse (car c'est la qualification qu'il lui donne), dépend de la Juridiction de Lacanau; qu'elle est distante, selon lui, de sept lieues et demie de Bordeaux. Nous devons ajouter, pour le plus grand éclarcissement, que la Juridiction de Lacanau est placée dans le Médoc, et qu'elle appartient à M. le Préside,t de Verthamon d'Ambloy; qu'Ignac, qui est situié dans la contrée de Buch, dépend de cette Juridiction. Comment cela se peut-il? C'est à nous à rapporter les faits selon la vérité, et non à en rendre la raison, lorsqu'elle nous est inconnue. On pourroit citer de pareils exemples sans sortir de ce Diocese; mais ce n'est pas ici le lieu de disserter sur pareils objets. Nous devons dire, dans l'intérêt de la vérité et dans l'état actuel des choses, qu'Ignac n'est point une Paroisse, mais un quartier annexé à celle de Lege. Ce qui induit en erreur M. l'Abbé Expilly, c'est que le quartier d'Ignac ayant un rôle de taille distinct et séparé, il en a inféré que c'étoit une Paroisse; mais une pareille induction peut souvent induire à erreur, sur-tout à l'égard de ce Diocese, où il existe diffens quartiers qui ont un rôle à part, sans pour autant former une Paroisse distincte et séparée. Nous devons ajouter que la distance d'Ignac à Bordeaux n'est pas de sept lieues et demie, comme le pense cet Ecrivain, mais qu'elle est, pour le moins de neuf grandes lieues.
Le quartie d'Ignac n'est distant que d'un quart de lieue de l'Eglise; il faut que ce Village soit à l'abri des sables de la mer, puisque c'est le seul de la Paroisse de Lege (qui en est presque entièrement infectée), qui en soit exempt.
Jean de Bourbon, Seigneur et Baron de Bazian, d'Audenge et de Lacanau, étoit aussi Seigneur d'Ignac vers la fin du seizième siecle.
La terminaison en ac du nom de ce quartier, indique qu'il est d'origine Celtique. Si cet ancien langage subsistoit encore, nous ne serions pas embarrassé de découvrir la signification du mot Ignac; car les anciens noms des lieux, qui nous paroissent barbares, en avoient une, dans le principe, dans le langage où ils avoient été puisés.
On est redevable à M. Bullet, Professeur-Royal de Théologie de l'Université de Besançon, et Associé à l'Academie Royale des Inscriptions et Belles-Lettres de la même Ville, d'avoir entrepris et exécuté un Ouvrage considérable, pour retirer de plusieurs Langues vivantes une quantité immense de mots Celtiques qu'elle avoient adoptés.
Ce Savant, dans ses Mémoires sur la Langue Celtique (chap. 7, p. 9), prouve, d'après des autorités incontestables, que la langue Latine s'est formée du mélange du Grec et du Celtique, que parloient des Colonies Grecques et Gauloises qui s'étoient établies dans le Latium; d'où il s'ensuit qu'on pourroit retrouver dans la langue Latine la signification des mots Celtiques que nous ignorons; mais il faut pour cela qu'il existe une parfaite analogie entre le mot Celtique et le mot Latin qui nous est connu. Le mot Latin ignis (par exemple), a une parfaite analogie avec le mot Ignac dont il est question ici. Ces deux mots sont composés chacun de cinq lettres, dont les trois premières sont parfaitement analogues entr'elles; il n'y a que les deux dernières qui forment leur différente terminaison, dont l'une est Latine et l'autre Celtique. Au reste, on convient en général que la terminaison d'un mot n'influe pas pour beaucoup dans signification; celle du mot Ignac nous est inconnue, mais il pourrait se faire que les trois premières lettres qui sont communes à ces deux mots, seroient aussi la racine de l'un et de l'autre, et pour ainsi dire le germe commun de leur signification : or, la rapprochant du mot ignis qui signifie feu, il semble que l'on seroit autorisé à inférer que le mot Celtique Ignac pourroit signifier incendie, ou lieu incendié par quelque évènement que la chose soit arrivée. Nous proposons nos conjectures à cet égard; et si on les trouve fondées, ce sera une ouverture de plus pour découvrir la signification de plusieurs noms de lieux qui nous paroissent barbares.

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