La Paroisse d’Andernos vu par l’abbé Jacques BAUREIN dans les « Variétés Bordeloises » Volume II, entre 1784 et 1786.

ARTICLE  XXXIII

SAINT-ELOI  D’ANDERNOS
 

 

Le texte est intégralement repris comme sur livre de l'abbé Jacques BAUREIN

 

On ne parlera que d’une manière très-succinte de cette Paroisse, M. le Curé n’ayant pas jugé à propos de fournir des renseignements d’aucune espèce. A la bonne heure qu’il s’y fût refusé, si toute autre personne que les Supérieurs du Diocese, ou quelqu’un qui n’en auroit pas le droit, les eût demandés ; il eut été de la prudence de ne pas se prêtrer au désir d’une personne inconnue, et des intentions de laquelle on ne seroit pas assuré. Mais maintenant qu’on a eu beaucoup plus de temps qu’il n’en falloit pour réfléchir, et sur la légitimité de la demande, et sur le bon usage qu’on se proposoit d’en faire, le refus persévérant d’un Curé qui est placé dans la société et qui est censé vouloir jouir des avantages de celle-ci, est-il bien honnête lorsqu’il ne se prête pas au bien de cette même société ?

Ces plaintes, quoique fondées, dira quelqu’un, ne sont pas la description de la Paroisse à laquelle vous vous êtes engagé par votre Ouvrage ; on en conviendra volontiers ; mais il faut convenir, à son tour, qu’elles ne sont ni déplacées ni étrangères au sujet, et qu’elle sont dans l’intérêt de la chose. Si ce n’étoit que dans la contrée de Buch, qu’un certain nombre de MM. Les Curés eussent négligé de faire passer des renseignemens sur leurs Paroisses respectives, on garderoit volontiers le silence ; mais on n’a déjà vu que de trop de preuves d’un pareil refus. Il y a même des Congrégations presque entières, qui paroissent avoir pris la résolution de garder le silence sur ce qui concerne leurs Paroisses respectives. Cela ne nous a point empêché de mettre la main à l’œuvre, et de publier publier les premiers Volumes du présent Ouvrage, dans l’espoir que les préjugés qui peuvent d’abord avoir fait impression sur quelques esprits, se dissiperoient avec le temps, et que lorsqu’on seroit convaincu (comme on peut l’être maintenant que le Public est en possession d’une partie considérable de cet Ouvrage), de la pureté d’intention qui y a présidé, on se flattoit que MM. Les Curés qui se trouvoient en demeure, se détermineroient à fournir leur contingent pour sa continuation, quelques-uns de ces Messieurs l’ont déjà fait d’une manière supérieure et qui leur fzait honneur. Il seroit à souhaiter que leur exemple fût suivi : ce seroit le vrai moyen pour que l’Auteur qui, par la publication du présent Volume, a rempli ses engagements vis-à-vis le Public, se déterminât à continuer de travailler sur le restant des Paroisses de ce Diocese. Mais il es temps d’exposer le peu qu’on sait sur la Paroisse dont il est ici question.

On ne dira rien autre chose de l’Eglise d’Andernos, sinon qu’elle est située au bord de Bassin d’Arcachon, et dans un lieu assez éloigné du Presbytere et des habitations placées dans cette Paroisse : on prétend, d’ailleurs, qu’elle risque d’être submergée tôt ou tard par les eaux du Bassin. C’est aux habitans à faire vérifier le fait, comme étant les Parties les plus intéressées ; et dans le cas à se pouvoir de bonne heure, et à ne pas attendre que le cas fût arrivé, il n’y a que trop d’exemples dans ce Diocese, de la dépérition des Eglises, occasionnée, soit par l’avancement des sables, soit par celui des eaux.

L a Paroisse d’Andernos est placée dans la contrée et Archiprêtré de Buch et Born, autrement de Parentis, qui en est le chef-lieu : elle est bornée, vers le midi, partie par la Paroisse de Lenton, et partie par le Bassin ; vers le levant et lnord, par des landes qui la séparent des Paroisses placées dans le district de l’Archiprêtré de Moulix, et vers le couchant, par la Paroisse de Lege.

Andernos dépend du Prieuré du Barp, uni au Monastere des Peres Feuillants de Bordeaux, qui sont Curés primitifs et gros Décimateurs de la Paroisse. Le Curé, par conséquent, n’a d’autre qualité que celle de Vicaire perpétuel. C’est dans l’étendue de cette Paroisse que sont situés le Bourg et le chef-lieu de la Seigneurie d’Arez, de laquelle dépend la Paroisse du Temple de Sautuge. Nous ne nous étendrons point ici sur ce quartier, attendu que nous proposons d’en parler dans un article distinct et séparé.

Cette Paroisse dépend de la Juridiction de Lacanau. L’Auteur du Dictionnaire universel de la France attribue à la Paroisse d’Andernos 248 habitans. M. l’Abbé Expilly y compte 55 feux. Cet Ecrivain place cette Paroisse à la distance de sept lieues de Bordeaux ; elle en est éloignée de huit grande lieues pour le moins. Il paroît par des titres de la fin du seizième siecle, que le sieur de Bastian étoit Seigneur d’Andernos. C’est maintenant M. de Caupos-Lavie qui est propriétaire de cette Seigneurie.

 

ARTICLE  XXXIII

QUARTIER  D’AREZ

Quoique M. le Curé de la paroisse dans laquelle ce quartier est situé, n’ai pas jugé à propos de fournir le moindre renseignement, ni sur ce qui concerne sa Paroisse en général, ni en particulier sur le lieu dont il est ici question, néanmoins nous exécutons ce à quoi nous nous sommes engagé, et nous allons parler du quartier d’Arez dans un article distinct et séparé.

Nous ne connaissons pas la distance précise de ce lieu d’avec l’Eglise paroissiale dont il est dépendant ; nous savons seulement que celle-ci n’est guere à portée des habitations placées dans son territoire. D’ailleurs, ce quartier n’étant pas de la Juridiction de laquelle dépend la Paroisse d’Andernos, il y a lieu de présumer qu’il est placé à quelque distance de l’Eglise, et dans quelque lieu qui, dans le principe, en étoit distinct et séparé : quelques raisons nous induisent à penser de la sorte, nous les allons exposer en peu de mots, pour que chacun soit à portée d’en juger.

En premier lieu, Arez est un chef-lieu d’une Seigneurie et Juridiction qui n’a rien de commun avec celles où est placée l’Eglise d’Andernos : il n’est pas naturel de penser qu’un lieu qui jouit d’une pareille prérogative, se trouve enclavé dans le district d’une Seignerie et Juridiction étrangere. Le Chef-lieu d’une Seigneurie ne peut être placé que dans un terrein qui lui soit propre, et qui soit dépendant de cette même Seigneurie en toute nobilité… En second lieu, on a sujet de penser qu’Arez, qui ne forme maintenant qu’un simple quartier de la Paroisse d’Andernos, pouvoit en être anciennement séparté, et former lui-même autrefois une Paroisse. C’est la qualité que lui donne M. l’abbé Expilly dans son Dictionnaire Géographique. On convient, à la vérité, qu’Arez ne jouit pas maintenant de cettre prérogative, et que cet Ecrivain ne s’est déterminé à lui donner, que parce qu’il voyoit que ce quartier avoit un rôle de taille distinct et séparé de celui de la Paroisse d’Andernos. Cet ordinairement à cette marque qu’on connaoît la distinction des Paroisses ; car on n’étoit pas anciennement dans l’usage d’accorder un rôle particulier à ce qui n’en faisoit qu’un simple Village ou quartier. Ce qui se trouve jouir de toute ancienneté d’une pareille prérogative, étoient certainement des lieux qui, à raison de leur Eglise, avoient un rôle particulier. Quoiqu’on n’ait pas trouvé jusqu’ici de preuve positive que le lieu d’Arez ait formé anciennement une Paroisse, il subsiste néanmoins une tradition qu’il y existoit anciennement une Eglise : on connoît même le local où elle etoit palcée : c’étoit dans le lieu appellé les Arroques, qui est assez voisin du moulin de Sire. Il y a d’ailleurs dans Arez, suivant M. l’Abbé Expilly, 72 feux, qui, à cinq personnes par feu, formeroient 360 habitans. Il y a des Paroisses dans le Diocese, où la population n’est pas aussi considérable.

On observera d’ailleurs que les maisons du quartier d’Arez sont construites en pierre de taille, et ce, dans un lieu qui en est entièrement dépourvu. Ces pierres ont été certainement transportées d’ailleurs, ce qui annonce l’ancienne opulence des habitans de ce quartier, qui les mettoit en état de pourvoir à la subsistance du Prêtre, qui auroit été chargé du Service de l’Eglise qui existoit anciennement dans ce quartier.

Arez est placé au nord et auprès de Bassin d’Arcachon ; il est séparé du quartier d’Ignac, dépendant de la Paroisse de Lege, par une craste (espece de fossé large, mais peu profond, qu’on pratique dans les landes, pour faciliter l’écoulement des eaux). On prétend que les habitans d’Arez sont aussi près de l’Eglise de Lege que de celle d’Andernos.

L’Auteur du Dictionnaire universel de la France, et M. l’Abbé Expilly, dans son Dictionnaire géographique, appellent ce quartier Arets ou Arez. Il n’y a que cette seconde dénomination qui soit la véritable ; la première est entièrement inconnue dans le pays, où elle n’a jamais été utilisée. Arez, ainsi qu’on l’a déjà observé, est le chef-lieu d’une Seigneurie et Juridiction mouvantes, à foi et hommage, de la Châtellerie de Blanquefort. C’est de la Juridiction immédiate de celle-ci que dépend le quartier d’Arez, si on en croit M. l’Abbé Expilly : cela étoit vrai dans le principe ; mais cette partie de Seigneurie et Juridiction en fut démembrée en 1601, et depuis cette époque Arez a formé une Seigneurie et Juridiction particulière et séparée, quoique mouvantes, ainsi qu’on l’a déjà dit, de la Châtellerie de Blanquefirt. M. l’Abbé Expilly n’étoit pas à portée d’être instruit du changement qui étoit survenu dans cette Châtellerie, c’est ce qui prouve qu’il n’est pas indifférent qu’un Ecrivain du pays rassemble de pareilles anecdotes, afin que les Etrangers en soient instruits au besoin.

Les habitans du quartier d’Arez s’occupent à la pêche dans le Bassin, et ils sont dans l’usage d’en apporter le produit à Bordeaux, ainsi que les habitans des autres Paroisses qui avoisinent ce Bassin.

La Seigneurie d’Arez n’a eu d’autres Seigneurs, dans le principe, que les anciens Châtelains de Blanquefort. Ce n’est que depuis le démembrement survenu en 1601, qu’elle a eu des Seigneurs particuliers. Un des premiers, depuis cette époque, fut M. Gabriel Dalesme, qui se qualifoit Conseiller du Roi et Procureur Général au Bureau des Finances de Guienne ; on le trouve ainsi qualifié dans différens actes passés par devant Notaire. M. Laville, qui vivoit dans le commencement de ce siècle, et qui étoit Seigneur, étoit connu dans le Public sous la qualité de Baron d’Arez. Cette Seigneurie a appartenu à M. Belcier, Gentilhomme, qui habite actuellement dans le Périgord, et qui decend d’un Premier Président du Parlement de Bordeaux, sous le regne duquel la Coutume de cette Ville fut rédigée.

La Paroisse du Temple de Sautuges en Médoc, est une dépendance de la Seigneurie d’Arez, et pour la haute Justice et pour la directité. Cette Seigneurie est distante de neuf grandes lieues, pour le moins, de Bordeaux, quoique M. l’Abbé Expilly n’en compte que huit dans son Dictionnaire géographique.

 

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