Un drôle de Zouave

 

La généalogie peut être un tableau de chasse à "l’ancêtre" mais, même s’il est nécessaire et indispensable de s’y soumettre, l’anecdote et le vécu de mes  aïeux me passionnent encore plus.

Dans les bulletins, " Vie du Cercle", deux articles me concernaient :

- Le premier sur "Solférino" puisque je l’avais écrit (une coquille s’est glissée dans l’écriture du nom : Técheney, mais tout le monde sait qu’il n’y a pas d’orthographe pour les noms propres et encore moins en généalogie).

- Le deuxième "Deuil rouge". Sur le mémorial de 1951 inauguré au Puch, parmi les 82 disparus on peut lire en bas à gauche le nom de TECHENEY G, c’était mon oncle...

Alors que ce n’était que pure coïncidence, ces articles sur Solferino et cette catastrophe d’août 1949 m’ont paru intimement liés ; la création et la destruction de cette forêt, la vie et la mort de ces hommes. Ce n’est pas sans émotion que j’évoque ce drame et plus particulièrement avec ma cousine demeurant à Belin-Béliet, fille de TECHENEY Gabriel victime du devoir, que la généalogie m’a fait redécouvrir.

La saga ne s’arrête pas là. Le grand-père de Gabriel, donc mon arrière grand-père, Guillaume, était zouave sous Napoléon III. Lors de mes investigations aux AD de l’Ariège, département d’origine des Técheney, la fiche d’incorporation de Guillaume m’avait appris que son père effectua à sa place le tirage au sort, Guillaume rejoignant alors le premier Régiment de Zouaves le 7 décembre 1857.

Le 9 mai 2009 lors de cette journée décrite dans le précédent bulletin, Monsieur Mesmin, auteur de Du Poitou à Soférino, présente la bataille de Solférino et l’itinéraire de son arrière-grand-père ainsi que son livre. Une des anecdotes concerne sa visite au service historique de l’armée de terre au château de Vincennes. Après quelques recherches sur internet où je découvre le monde des Zouaves, leurs régiments, leurs campagnes, leur bravoure et leur engagement sans limite, nous décidons mon épouse et moi-même d’imiter Monsieur Mesmin.

De bon matin le château de Vincennes et ses formalités administratives nous accueillent. Il fallait prendre rendez-vous. Première déception. En expliquant que nous venons spécialement de Bordeaux, une exception sera faite. Les documents fournis ne nous donnent aucune indication sur les états de service de Guillaume. Plusieurs personnes nous expliquent que pour entrer en possession de ceux-ci, il faut retourner aux archives de l’Ariège. Le moral est en berne. En fin de soirée, au moment de rendre les derniers livres, un(e) adjudant chef nous demande ce que nous cherchons. Je lui explique notre démarche, elle m’affirme que les états de services de "mon zouave" sont bien à Vincennes. Comme nous  devons reprendre le train le soir même, elle me demande mes coordonnées.

15 jours s’écoulent et un matin une grande enveloppe encombre ma boite aux lettres. J’ouvre.

15 photocopies d’une très grande qualité sont sous nos yeux et une carte les accompagne ;

Madame, Monsieur, Voici les états de service de Guillaume TEYCHENNÉ qui a servi au 1er Rgt de Zouaves puis au Régiment de Zouaves de la Garde Impériale. Il a participé à la campagne d’Italie puis à celle du Mexique, il est même allé en Syrie. Il a perdu son galon de 1ère classe pour un curieux motif « pour ne pas s’être opposé à la révolte de la Martinique ».

Je vous joins 2 illustrations montrant la tenue portée au Rgt de Zouaves de la Garde Impériale. En souhaitant que ces documents vous feront plaisir et oublier votre "malheureuse" journée de recherches au S.H.D*… Cordialement.

Il existe quand même des personnes fort sympathiques.

Vous pouvez vous imaginer la joie de recevoir un tel courrier. Tout y est. Je découvre qu’après 7 ans au service de la patrie il renouvelle son engagement pour encore 7 ans. Il fait toutes les campagnes même celle de 1870 ; il a deux médailles, celle d’Italie et celle du Mexique. Bien que contestataire, il termine dans la Garde Impériale.

Ce qui me fascine le plus c’est de réaliser que Guillaume reste 14 ans sous les drapeaux, toujours au combat et sans blessure. La campagne d’Italie est une boucherie. Pour la seule bataille de Mélégnano, à laquelle il participe, l’estimation est d’environ 1 000 morts côté français et au Mexique, sur 38 493 militaires français présents 6 654 meurent de blessures ou de maladie. Il se marie à plus de 35 ans, a 6 enfants, avec sa famille de l’Ariège il émigre sur les bords de la Garonne à St Julien de Beychevelle et meurt à plus de 86 ans chez les Petites Sœurs des Pauvres rue Judaïque à Bordeaux. Il nous a fallu beaucoup de persévérance pour retrouver sa sépulture dans le registre du cimetière de la Chartreuse, la mairie de Bordeaux nous ayant répondu qu’il n’y avait pas de Teychené mort à Bordeaux à cette époque.

Avant d’entamer mes recherches généalogiques, j’ignorais que mes racines étaient ariégeoises et c’est grâce mon arrière grand–père Guillaume que j’ai pu les découvrir.

Pour un pâtre né en face du Mont Valier en Ariège, sa destinée et son parcours ne sont pas sans panache.

Un grand merci à la généalogie pour cette nouvelle aventure que nous venons de vivre.

                           

*SHD : Service Historique de la Défense.

 

 

 
 

Tous droits réservés - Copyright 20120 Urtxoko