Dans le sillage de Pierre LOTI

 

L e 12 octobre 1967, dans la villa " Ramuntcho " située rue Jules BARAT à Gujan-Mestras, s'éteignait, à l'âge de 92 ans, Mr Osman DANEY.
Lorsqu'il vit le jour, en 1875, dans une famille de marins habitant le quartier de Meyran, rien ne laissait prévoir que son existence puisse être différente de celle de ses concitoyens.
L'avenir, en ce temps là, était tout tracé pour ceux issus de familles pauvres, ne pouvaient compter que sur leur labeur et la mer pour assurer leur subsistance.

Le destin du jeune DANEY, prénommé André à l'état civil, serait donc d'être marin, comme ses parents. Comme la plupart de ses camarades, il accomplirait son service militaire dans la Marine, et probablement à son retour fonderait une famille.

C'est précisément durant la période du service militaire, dont la durée était alors de 3 ans, que le hasard apporta dans la destinée d'Osman DANEY une modification tout à fait extraordinaire.
Alors qu'il était à Rochefort, en 1897, il fut désigné pour remplacer momentanément l'ordonnance, tombée malade, du commandant du " Javelot ".
Cette situation ne pouvait avoir qu'une durée limitée car Osman était libérable l'année suivante en 1898.
Le " Javelot " était un aviso, stationnaire, basé à Hendaye dont le commandant était le lieutenant de vaisseau Julien VIAUD. Ce commandant était célèbre et beaucoup plus connu sous le pseudonyme Pierre LOTI.

Membre de l'académie française, Pierre LOTI avait en 1897, déjà écrit " Aziyadé ", " Pêcheurs d'Islande ", " Mon frère Yves " et il devait publier cette année là, " Ramuntcho ".

Osman DANEY exerça donc sa fonction d'ordonnance du commandant écrivain durant quelques mois, jusqu'à sa libération, en 1898, qui lui permit de retrouver sa maison de Meyran, ses parents, son métier de pêcheur et d'ostréiculteur.

Deux ans plus tard, en 1900, Pierre LOTI qui vient d'être élevé au grade de capitaine de frégate, fait parvenir à son ancienne ordonnance une lettre de proposition d'emploi dans son service personnel, avec le grade de quartier-maître d'agent du service civil. Autrement dit, Pierre LOTI propose à Osman DANEY de devenir son majordome.

Célibataire, jeune (il a 25 ans et épousera Jeanne DAMBLON, le 3 août 1903), Osman accepte cette offre inespérée, rallie Rochefort et embarque sur le  " Redoutable ", commandant Julien VIAUD, qui appareille pour la Chine le 2 août 1900.

Commence alors pour notre concitoyen, une période qui durera 23 ans et ne s'achèvera que par la mort de Pierre LOTI le 10 juin 1923.
Période riche en voyages, évènements de toutes sortes, rencontres; période qui verra naître et se développer une estime réciproque entre le commandant écrivain et son serviteur; estime qui réunira, dans quelques circonstances de la vie, Pierre LOTI  aux membres de la famille d'Osman DANEY.
Ainsi ce voyage que relate le Journal d'Arcachon, en date du 29 juin 1902 : " le 23 juin dernier, M. Pierre LOTI est descendu en gare de La Hume où il a été accueilli par quelques journalistes, pour aller s'asseoir ensuite à la table de la famille DANEY, à Meyran ".
De son arrivée au Cap-Ferret, début avril 1911, l'écrivain, note dans son " Journal intime " :
" Quand j'aborde cette terre de l'autre rive, il fait nuit. Ces maisonnettes basses, à véranda, sur le sable, dans la verdure des pins, on dirait un village des colonies. La maisonnette neuve d'Osman est là tout près, adorablement gentille. On dîne devant un grand feu de pommes de pins..."

La " maisonnette d'Osman " existe toujours, rue de la jetée à Bélisaire, proche du débarcadère, cachée par une haie de troènes. Ses propriétaires actuels l'ont appelée " Pierre LOTI ".

La maison de Meyran existe aussi, lieu-dit " Le Bec ", mais aucune rue de la commune de Gujan-Mestras ne perpétue le nom de Pierre LOTI.

Le 05 juin 1923, Osman DANEY, en permission dans sa famille, est rappelé par télégramme pour se rendre immédiatement à Hendaye. L'état de santé de Pierre LOTI vient de s'aggraver brusquement. Dans sa maison " Bakhar etchea " où il séjourne, l'écrivain a réuni sa famille et quelques amis dont Osman DANEY et deux autres anciens matelots.
Il rendra le dernier soupir le dimanche 10 juin 1923.

Pour Osman, les 44 années qu'il a à vivre reprendront désormais le cours normal d'une existence sans histoires.
Son souvenir demeure dans la mémoire de sa nombreuse descendance, ainsi les 5 plus jeunes enfants de sa lignée découvrirons un jour les merveilleuses histoires de leur lointain, lointain grand-père.

 

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