La commune de Gujan placée sur les bords du Bassin
d'Arcachon et non loin de l'océan (12 à 15 km en ligne droite) jouit par
cela même d'un climat marin qui atténue les températures extérieures.
D'autre part sa situation géographique, un peu au dessus du 45ème degré
de latitude nord la place dans la zone tempérée.
On y a cependant vu de grands froids et de fortes chaleurs.
Sans remonter au terrible hiver 1709 je relaterai seulement celui de
l'hiver 1829/1830 dont m'a entretenu ma grand mère. Le Bassin, tout
entier, fut gelé. Les habitants allaient sur la glace prendre les
canards qui s'y trouvaient retenus par les pattes. Ils en revenaient
chargés; l'un de ces chasseurs y laissa la vie; à un certain endroit la
glace cède et il s'engloutit sous les yeux de ses compagnons impuissant
à le secourir.
Le vin gelait, même les œufs dans les poulaillers.
Très froid encore en 1879, en 1890/1891.
Le Bassin complètement glacé formait un tableau magnifique qui inspirait
l'admiration avant de provoquer la tristesse. Partout d'un blanc de
neige, de glace plutôt, enserrant par endroit les bateaux grands ou
petits. Les courants à haute mer accumulaient d'énormes tas de glaçons
qui se congelaient à nouveau et formaient de petites banquises à
l'embouchure de l'Eyre notamment, on se serait cru dans une région
hyperboréenne.
Grands froids encore en 1913/1914 (-12°C) et en 1920 (-14°C).
Par contre on y enregistre des chaleurs extrêmes.
En 1892, le 15 Août, un vent de sud, véritable siroco valut une
température équatoriale qui grille des plantes et assèche les fruits,
41,9°C le 16 Août et 40,2°C le 17 Août.
En 1893 la sécheresse qui causa un si grand désastre au point de vue des
récoltes dans la majeure partie de la France n'a pas épargné Gujan. Les
foins, les blés, les seigles et autres menues récoltes y furent à peu
près nulles.
Du moi de février jusqu'au 16 mai où il tombe quelques gouttes de pluie,
il n'y eu de bonnes ondées qu'aux premiers jours d'août. Le vin seul fut
de qualité supérieure en abondance.
En 1900 et en 1904 le mois de juillet fut très chaud, 38°C alors que la
moyenne est de 25,75°C.
En 1934le 7 juillet le thermomètre a marqué 37,7°C, heureusement que ce
sont des exceptions car des pluies sont assez fréquentes souvent très
abondantes. Au printemps 1934 la surabondance de pluies a empêché toute
culture potagère et en plus cette humidité a nuit aux autres cultures,
les vignes seules se sont bien tenues.Les brouillards ne se ressentent
guère que dans les mois de mai, ils sont épais et nos marins doivent
faire usage de la boussole ou compas pour rentrer à leur parc à huîtres
à moins qu'ils ne préfèrent rester à terre.
Je n'ai jamais vu de grêle, les anciens disent qu'en
1860 ce terrible fléau ravagea les récoltes.
Les vents (sud-ouest et nord-ouest) y sont fréquents
et violents. Les tempêtes n'y font que trop d'apparition, retardant les
travaux sur les parcs à huîtres, brisant les bateaux et prélevant,
malheureusement, un fort tribu parmi nos marins.
Les cyclones y sévissent parfois:
Le 20 août 1876 une trombe épouvantable s'abattit sur la région et la
commune disparut bientôt dans un nuage de poussière, de petits cailloux,
de brindilles et parmi quantité de petits crapauds.
Les embarcations amarrées au port se brisèrent les uns sur les autres,
quelques unes même furent totalement enlevées et retombèrent à quelques
cinquante mètres au loin. On rapporte qu'une pinasse fut projetée sur la
toiture d'une cabane qu'elle écrasa du coup. L'orage passé inonda la
terre. Quelques uns trop loin enracinés étaient totalement décapités. La
circulation était rendue impossible sur la grand rue N° 104 par les
arbres qui la barrait. De la Hume à la limite de la commune du Teich on
en comptait plus de 400 quelques uns d'une circonférence de 2 mètres. Le
vent soufflant du sud-ouest sur le Bassin, bateaux coulés, bateaux en
dérives, rien ne manquait. On eut heureusement aucun mort à déplorer
dans la commune, de mémoire d'homme on n'avait vu un pareil ouragan.
La partie de la commune entre voie ferrée et le Bassin est parfois
visitée par les grandes marées. La voie ferrée même a été plusieurs fois
recouverte par l'eau de mer. En 1878, le 22 octobre il y eut une marée
extraordinairement forte. L'eau venait en certains endroits jusqu'à la
route départementale où l'on arrivait en embarcations. Les réservoirs à
poissons, protégés pourtant par de hautes digues, furent submergés. Il
vas sans dire que tous les poissons ou à peu près, ont profité pour
sortir de la prison, d'où perte sèche pour le propriétaire. Les chevaux,
vaches et bestiaux divers qui pâturaient sur les bosses (hauteurs
séparant les réservoirs à poissons) furent en majeure partie noyés, ce
qu'il y eut de pertes causées par cette forte marée, huîtres, poissons
et matériel est inouï. Verdalle La Hume, un enfant de 4 ans ou 5 ans
Lalanne reste toute la matinée, gelé, sur une étagère de la cuisine à
même la cloison. L'Ile aux Oiseaux, en face d'Arcachon, qui fait partie
de la commune de La Teste fut entièrement submergé, les cabanes
emportées, plusieurs personnes noyées dont deux de la commune de Gujan,
une troisième, "Couec" père et beau-frère des présidents, âgée d'une
cinquantaine d'années se sauva sur une poutre et brisée de fatigue, à
moitié assommée par les coups de mer vint se jeter sur un chalutier
amarré devant Arcachon, s'accrochant à la chaîne où elle fut recueillie
par les matelots du bord. Elle resta plusieurs jours entre la vie et la
mort.
Presque tous les pontons rompirent les amarres désamarrèrent et
dérivèrent vers la pointe de l'Eyre, Lanton, Taussat, plusieurs avec
leurs propriétaires à l'intérieur, Dieu sait dans quelle perplexité!!
Les orages ne produirent pas de dommages sérieux, parfois des dégâts
matériels provoqués par la foudre.
* Les
pontons: étaient des bateaux courts et larges hauts de bord avec
un rouf, cuisine et chambre, fortement ancrés sur les parcs à huîtres et
ou un garde, ou l'exploitant, lui-même, se tenait la plupart du temps
pour la surveillance de ces mollusques convoités par des maraudeurs.
Les derniers pontons disparurent le 6 décembre 1896 à la suite d'une
tempête qui causa aux parcs des pertes considérables, jeta les pontons à
la côte, on les ramena au port pour être démolis. |