La Révolution française est-elle une révolution culturelle ?

La musique et le théâtre
 

I- La musique

A) L’enseignement musical

Cet enseignement se fait dans le cadre des maîtrises, plus de 500 maîtrises sont installées dans les chapîtres des églises ou des cathédrales. Les filles en étaient exclues, pour apprendre la musique, elles devaient avoir recours à des maîtres particuliers. Ces maîtrises étaient des sortes d’internats, on y entrait à l’âge de 7-8 ans, pour cela, il fallait avoir une voix juste et agréable. Les enfants recevaient un enseignement général, les adolescents quittaient la maîtrise à l’âge de la mue, ils ont donc appris à chanter en chœur, mais ils n’ont pas appris à jouer d’un instrument, leur bagage était assez mince, ils devaient avoir recours à un professeur particulier pour se spécialiser.

L’Ecole royale de chant a une double origine, le XVIIIe siècle voit en France un développement important de l’opéra, les enfants peuvent y entrer. En 1784, une Ecole royale de chant est fondée sous la direction de Gossec, il y a 21 maîtres de chant pour 30 élèves en 1788. Le recrutement n’était pas très important.

En 1792, les maîtrises sont fermées, la Révolution va pallier ce vide en étant à l’origine de la création d’un enseignement musical. Bernard Sarrete, né en 1765, monte à Paris en 1788 et travaille dans la comptabilité. En 1789, il est engagé dans la Garde Nationale et il accepte de créer un corps de musique de la Garde Nationale Parisienne. De 1789 à 1792, ce corps de musique fait partie de toutes les grandes fêtes publiques. C’est une musique militaire avec des instruments à vent et des tambours. Il propose de créer une école de musique militaire. Sarrete veut former des musiciens au service de la Révolution.

En novembre 1793, il demande la transformation de cette école en institut national de musique. La Convention répond positivement, de nouvelles classes sont ouvertes et il fait appel à des artistes supplémentaires comme Méhul ou Lesueur. A la fin de 1794, l’institut compte 60 classes avec des professeurs de prestige. A la même période, une campagne de presse est organisée pour obtenir la transformation de l’institut en conservatoire.

En juillet-août 1795, le poète Chenier présente un rapport à la Convention, il y montre l’utilité de l’art musical qui doit exalter les soldats, cet art fera aussi les délices de la paix. Le 03 août 1795, un décret crée le conservatoire, dont la direction est confiée à Sarrete, on y dénombre 115 professeurs pour 600 élèves, les femmes sont présentes, une des premières enseignantes sera Montgeroult, c’est l’école la plus vaste de l’époque.

B) Musique révolutionnaire

On assiste à une production massive d’hymnes et de chants, ce sont des œuvres de circonstance sans lendemain même si elles sont écrites par des auteurs illustres. Ce répertoire est souvent jugé avec un certain mépris, du fait de son idéologie, et car on applique à la musique révolutionnaire la même grille de musique des autres chants.

Il faut chercher leur intérêt en essayant de comprendre la fonction de cette musique. La musique révolutionnaire veut porte un message, elle est en rupture avec la musique traditionnelle. Il faut des chœurs, des chorales, des instruments à vent, des tambours.

C) La production musicale

La musique instrumentale a été négligée, les concerts d’avant la Révolution faisaient de Paris la ville la plus riche d’Europe. Mais il n’y a pas de concerts sous la Révolution, il y a eu une marée de musiques instrumentales destinées au plein air et non aux concerts. Le 29 septembre 1790, Gossec fait jouer à Paris la Marche lugubre. C’est une musique originale, avec des instruments nouveaux, les tam-tams, la musique est interrompue par des silences que l’auteur veut expressif. Le " Chant national " du 14 juillet 1800 de Méhul est un vecteur original, il est donné par trois orchestres et chacun des trois chœurs est placé dans un coin de l’église (stéréophonie). Le " Chant du 1er Vendémiaire " de Lesueur fait appel à quatre orchestres et quatre chœurs.

A l’Opéra, il ne se passe pas grand chose, soit on reprend les opéras du XVIIe siècle (Gluck, …), soit on en crée de nouveaux qui ne sont pas fameux. L’Opéra comique est beaucoup plus riche : " Apothéose " de Joseph Barra.

A Paris et en province, il y a beaucoup de chansons nées de circonstances politiques, il existe des chansons révolutionnaires et des chansons contre-révolutionnaires. Trois chansons ont survécu, " La camargnole " à l’été 1792, " Ca ira ! " en 1790, " La Marseillaise ".

Rouget de Lisle était un soldat passionné de musique, cette chanson est composée en avril et elle parcourt plusieurs villes jusqu’à Marseille. La Marseillaise est interdite de 1815 à 1830, dès cette date on l’entend de nouveau mais elle ne retrouve son statut d’hymne national que sous la Troisième République.

La Marseillaise

II- Le théâtre

A) La liberté théâtrale

Sous l’Ancien Régime, il n’y a pas de liberté du théâtre. On ne peut ouvrir de salle de spectacle sans obtenir d’autorisation. Le théâtre est surveillé par la censure. Dès les premiers temps de la Révolution, des mesures vont être prises en faveur de la liberté du théâtre. Tout a commencé en 1789 avec " La bataille de Charles IX ", c’est une pièce écrite par Marie-Joseph Chénier, c’est une pièce contre le clergé qui présente Charles IX comme un personnage faible. La pièce est interdite, il faut un an de lutte pour que la première représentation ait lieu le 04 novembre 1789, cette représentation a sonné le début de la contestation pour obtenir la liberté du théâtre. La loi du 13 janvier 1791 instaure la liberté du théâtre, tout citoyen peut élever un théâtre public à la condition d’en faire la déclaration à la municipalité, une liberté totale est donnée aux pièces (sous l’Empire, le théâtre passe à nouveau sous le contrôle du gouvernement). le théâtre peut être une propagande favorable à la Révolution, le 02 août 1793, la Convention vote un décret à l’initiative de Boissy d’Anglas, tous les théâtres de Paris devront deux fois par semaine représenter des pièces rappelant des événements de la Révolution et tout théâtre qui représenterait des pièces jugées contre-révolutionnaire serait fermé. Le 14 mai 1794, un décret rétablit la censure, les pièces doivent être soumises au Comité d’Instruction Publique. En trois mois, 161 pièces ont été soumises, 33 interdites et 25 corrigées. La surveillance du théâtre s’est aggravée sous le Directoire. La liberté du théâtre va disparaître complètement sous l’Empire, plusieurs décrets limitent le nombre de théâtre (huit à Paris).

B) Le répertoire théâtral

La Révolution a engendré un bouleversement culturel, si l’ancien répertoire est maintenu jusqu’en 1792, ces années 1789-1792 voient l’irruption des pièces patriotiques. Cela entraîne une modification du comportement des spectateurs, mais aussi une révolution dans les costumes, on adopte les costumes à l’antique. C’est Talma, l’un des principaux acteurs de l’époque, qui a instauré ce costume. Sous la Convention montagnarde, la révolution culturelle s’accroît. Le théâtre doit éduquer, il faut mettre tous les spectateurs sur un pied d’égalité, les loges disparaissent des théâtres. La révolution est présente dans ses symboles. Il y a également une révolution dans le répertoire, on ne joue plus Molière, Racine, … . C’est l’antiquité héroïque qui devient le sujet des pièces qui rappellent les succès de la République (siège de Thionville, Brutus, …). Des mœurs nouvelles apparaissent, c’est le temps du tutoiement. On raconte les exploits des sans-culottes, les spectateurs sont interpellés. Les spectacles se finissent toujours par une fraternisation entre acteurs et spectateurs. On parle des grands débats politiques et sociaux. C’est un théâtre civique qui est remis en question sous le Directoire, on rétablit les loges, on retire les symboles de la Convention montagnarde. Le théâtre de la Révolution a une très mauvaise réputation. Les comédiens sont des individus à part, il y a une volonté de créer un art nouveau mêlant citoyens et acteurs. Ce sont les racines du théâtre populaire qui naît dans l’entre-deux guerres.

 

 

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